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On assiste aujourd’hui en France et dans le monde à un développement considérable des monnaies complémentaires : des monnaies, souvent créées par les citoyens eux-mêmes, circulant à côté, parallèlement à l’euro.

Elles permettent de revivifier considérablement les économies locales, de lutter contre le chômage, de recréer du lien social et d’améliorer la qualité de vie de leurs utilisateurs. On en dénombre plus de 5000 à l’heure actuelle de par le monde…

 

Le développement incroyable des monnaies complémentaires : vers une prospérité durable ?

 

Les monnaies complémentaires ont des formes diverses, aussi bien matérielles que virtuelles, en fonction de la nature et de la volonté de leurs initiateurs. Certaines sont locales (elles ne fonctionnent que sur un village ou une ville), d’autres sont régionales (comme les regios en Allemagne), d’autres encore nationales, comme le WIR en Suisse. Elles sont un moyen pour leurs initiateurs et leurs utilisateurs de faire face au manque d’argent et au chômage.

En France, on peut citer entre autres comme exemples de monnaies complémentaires locales la mesure à Romans sur Isère (Drôme), l’Abeille lancée en 2009 à Villeneuve sur Lot , la Luciole à Joyeuse et la Bogue à Aubenas pour l’Ardèche , l’Occitan à Pezenas , l’Echo à Angers, la Roue à l’Isle sur la Sorgue (Vaucluse), la Commune à Roanne (Loire), le Déodat à Saint-Dié (Vosges), l’Eco à Anemasse (Haute Savoie), le Tiok à Thoiry dans l’Ain, l’Epi au Havre, les 450 SELs (Systèmes d’Echange Locaux) sur tout le territoire , les monnaies SOL en circulation ou en projet à Carhaix, Lille et région lilloise, Viry Chatillon (Essonne), Mulhouse (Alsace), Franche Comté, Chambéry, Grenoble, Toulouse … (1).

Les monnaies locales constituent un bon moyen pour un territoire de faire face à la désertification des petits commerce, à la délocalisation, au chômage et ainsi de se réapproprier l’économie et de la rendre plus humaine, tout cela sans peser sur le contribuable local ou sur les budgets nationaux. Comme les assemblées directes locales, les expériences de monnaies complémentaires ont aussi comme résultat de recréer du lien social et de revivifier la solidarité au niveau des communautés locales.

Les données et statistiques prouvent (2) d’ailleurs que « l’usage de monnaies diversifiées engendrent différents types de relations humaines et facilitent d’autres options et attitudes de vie » (3) . Il n’est dès lors pas étonnant que le réseau des villes et territoires en transition (http://villesentransition.net/ ) propose des monnaies complémentaires comme outil de «résilience» par la localisation de l’économie (par exemple à Brixton ou Totnes, en Angleterre).

Ces monnaies n’étant pas soutenues par un gouvernement national, elles doivent être gérées par une structure qui respecte les réglementations monétaires de la Banque de France et de la Banque Centrale Européenne. Cela permet de faire circuler légalement un moyen de paiement autre que l’euro, et adossé à l’euro (4).

Pour plus d’informations pratiques, une fiche méthodologique « Comment créer une monnaie locale » est disponible sur Ekopédia, à l’adresse suivante : http://fr.ekopedia.org/Comment_cr%C3%A9er_une_monnaie_locale

On peut contacter également le réseau des monnaies locales dont le programme de travail inclut, par exemple, la question des pratiques techniques et démocratiques, du rapportaux institutions, de l’essaimage… On peut également citer le «guide de mise en œuvre d’une monnaie complémentaire» rédigé par Philippe Derruder et l’Association Aises.

 

L’intérêt des monnaies complémentaires aujourd’hui à l’échelle française, européenne et mondiale

 

Les Cahiers d’espérance sont le fruit d’un travail collaboratif mené sous l’impulsion du Labo de l’économie sociale et solidaire (ESS). Ont été organisés Les États généraux de l’économie sociale et solidaire qui ont lancé une dynamique dans la France entière pour parler d’une seule voix et présenter une autre forme d’économie plus vertueuse, efficace et équitable.

Pour la première fois l’ensemble des acteurs ont travaillé sur une même méthode et un cadre commun pour valoriser leur initiatives à travers des cahiers d’espérances. Les États généraux de 1789 s’étaient organisés autour de Cahiers de doléances. Les États généraux de l’ESS, qui se sont déroulés au palais Brongniart à Paris du 17 au 19 juin 2011, ont été l’occasion de produire des « Cahiers d’espérances », œuvres collaboratives d’ampleur librement accessibles à l’adresse http://lelabo-ess.org/?-Les-Cahiers-d-esperances- .

Un des cahiers d’espérance s’intitule « Richesses et monnaies » http://www.pouruneautreeconomie.fr/?q=node/738: il nous fournit un exposé explicatif très clair sur les monnaies complémentaires, et présente en détail plusieurs expériences actuelles en France et à l’étranger.

Voici ce qu’il nous apprend, en en se basant sur le livre de Margrit Kennedy Libérer l’argent de l’inflation et des taux d’intérêt (5), sur l’argent et sur la manière dont l’argent est créé : « Contrairement à ce que l’on pourrait penser, aujourd’hui, la monnaie n’est créée ni par les gouvernements, ni par les banques centrales (bien qu’elles y prennent part) mais par les banques privées dites «secondaires», lorsqu’elles consentent des prêts. En effet, c’est l’activité de crédit qui crée de la monnaie, et ce sont ces banques secondaires qui ont l’initiative du crédit (elles ne se contentent pas, comme on pourrait le croire dans un premier temps, de re-prêter passivement leurs ressources ou les dépôts de leurs clients). (…) Le système de création monétaire basé sur le prêt avec intérêt (intérêt qui va bien au-delà de la rétribution à la banque de ce «service» de prêt) correspond de fait à un transfert permanent de la richesse produite vers les mains de quelques uns, et en particulier les banques (…).

Dans ce même ouvrage, Margrit Kennedy montre que «les intérêts sont inclus dans chaque prix que nous payons. Le montant exact varie en fonction du rapport coût du capital/coût de la main d’œuvre des biens et des services que nous achetons». Plus les biens et services que nous achetons incorporent du capital emprunté, plus nous en payons le coût. Même si les estimations sont imprécises, ceux-ci tournent autour d’une moyenne de qui peut aller jusqu’à 50% des prix de nos biens et services en «coûts du capital».

Nous voyons tous que l’outil monétaire dysfonctionne. La principale fonction de la monnaie, poursuit Margrit Kennedy, sa justification historique, est (…) de faciliter l’échange et l’activité entre les êtres humains, en établissant une unité de compte commune et en créant un espace de confiance. Cet étalon permet alors un échange très supérieur à ce que permettent des formes comme le troc.

Or cette fonction première est aujourd’hui gravement mise en cause…. Tout l’enjeu est dès lors « de promouvoir une logique d’échange face à une logique de domination hors contrôle démocratique par les citoyens », et de redonner à la société civile le pouvoir de contrôle de la création monétaire.

Dans cette optique, et face à ces dysfonctionnements, les monnaies sociales et complémentaires reprennent alors l’idée de base, celle d’une d’une monnaie outil pour faciliter les échanges entre les êtres humains. Elles s’ancrent dans la définition de la monnaie comme «un accord au sein d’une communauté qui utilise un objet standard comme moyen d’échange» (Bernard Lietaer) (6) : les monnaies sociales et complémentaires proposent une autre façon d’échanger. «L’accord» n’est plus le même. Cet accord se construit autour de l’idée d’un outil au service d’un projet et d’un modèle de société qui pourrait se résumer par les questions : quels échanges, pour quoi, entre qui ? Les monnaies sociales complémentaires apparaissent comme un outil pour promouvoir d’autres types d’échange, des « échanges qui ont du sens», et, comme on l’a vu, les initiatives se multiplient. L’enjeu est alors qu’elles puissent être vecteur d’un autre modèle de développement économique : forcément solidaire et inclusif, au service de tous et de la transformation du territoire.

 

Une pratique vieille comme le monde qui a fait ses preuves

 

Tout comme les assemblées directes locales, les monnaies complémentaires ne sont pas des phénomènes nouveaux, mais elles restent relativement méconnues et peu enseignées dans nos cours d’histoire. Les monnaies complémentaires qui ont existé dans l’histoire ont pourtant correspondu à des périodes de prospérité pour les habitants.

Contrairement aux idées reçues, les monnaies régionales « disposent en Europe d’une historicité considérable. Elles existèrent de façon continue entre Charlemagne et Napoléon. Plus important encore, elles ont eu un impact positif sur l’économie et la vie sociale de notre continent. En tout état de cause, il faut noter que, si les monnaies régionales ont disparu du paysage européen, ce n’est pas en raison de leur inefficacité. Dans la plupart des cas, elles ont été abolies, sans autre forme de procès, par un pouvoir central qui entendait étendre l’usage de son propre système monétaire pour mieux contrôler les économies régionales, et cela sans égard pour les effets négatifs sur la population (7). Il est important de rappeler que la monopolisation monétaire s’est souvent accompagnée de mesures de répression – militaires si nécessaire – et de l’interdiction de systèmes et d’usages préexistants (8) ».

Là encore, le parallélisme avec les assemblées des villes et les luttes des communes contre l’État pour le maintien des « libertés municipales » est frappant.

 

Monnaies Yang, monnaies Yin et la complémentarité

 

Le Yin-Yang est un concept taoïste de relation entre deux polarités. Le yin correspond plutôt au féminin, au coopératif et le Yang au masculin et au compétitif. Selon Lao Tseu, « Quand le masculin et le féminin se combinent toutes les choses réalisent l’harmonie (9) ».

Les monnaies conventionnelles, comme l’euro ou le dollar, peuvent être qualifiées de monnaies Yang. « Une monnaie Yang est une monnaie dont l’émission est basée sur une hiérarchie, sur laquelle on applique un intérêt qui en encourage l’accumulation, et qui tend à créer la compétition entre ses utilisateurs. Toutes les monnaies conventionnelles sont des monnaies Yang parce qu’elles manifestent chacune de ces caractéristiques. C’est pourquoi l’économie compétitive qu’elles alimentent sera définie comme « économie Yang ». Une économie Yang vise à générer du capital financier (10). »

Les monnaies complémentaires, quant à elles, peuvent être qualifiées de monnaie Yin. « Une Monnaie Yin est une monnaie dont l’émission est gérée par les utilisateurs eux-mêmes, qui décourage l’accumulation (par exemple par surestarie) et qui encourage la coopération entre ses usagers. L’économie Yin vise à générer du capital social (11). »

La complémentarité entre monnaies Yang – monnaies conventionnelles – et monnaies Yin – monnaies complémentaires, régionales ou locales – pourrait nous permettre de lutter efficacement contre la rareté de l’argent et contre le chômage et nous conduire vers une prospérité économique, financière et sociale durable, ainsi que l’analyse Bernard Lietaer : « ( …) les monnaies complémentaires sont un des instruments qui facilitent la transition vers le prochain système économique. The Future of Money donne un plan détaillé pour une stratégie systématique qui offre dès aujourd’hui une possibilité réaliste d’atteindre l’abondance durable en une génération au moyen des monnaies complémentaires. La possibilité de créer des monnaies complémentaires en quantité suffisante sans provoquer de l’inflation est particulièrement importante (12). »

 

Deux exemples de grande ampleur de monnaies complémentaires à l’étranger : le WIR et le Chiemgauer.

 

L’exposé de ces deux exemples sont tirés du cahier d’espérance  » Richesses et monnaies » http://www.pouruneautreeconomie.fr/?q=node/738: l’exposé sur le WIR est l’œuvre de Marie Fare, doctorante à l’université de Lyon 2, pour la Lettre du réseau SOL Alpin. Celui sur le Chiemgauer a été écrit par Celina Whitaker dans le cadre du Séminaire «Monnaies Complémentaires» organisé en2009 par l’Association SOL et la Mairie de Nanterre.

 

1)Le cercle de coopération économique WIR, en Suisse :

 

Il est né en 1934, afin de lutter contre les effets de la dépression sur les petites et moyennes entreprises (PME) faisant suite à la crise économique et monétaire des années 30. Son objectif est ainsi de promouvoir et de soutenir les PME. Actuellement en Suisse, une PME sur 5 utilise le WIR.

Des échanges entre PME facilités

Le WIR de «Wirtaschaft Ring», cercle économique en allemand mais aussi de «wir» signifiant «nous» en allemand, fonctionne à parité avec le franc suisse. C’est un système d’échange-marchandises entre des PME visant à faciliter les échanges entre ses membres, à travers la compensation des dettes et des créances, comptabilisés sur des comptes à partir d’une unité monétaire interne, le WIR. On fait donc une comparaison des dettes, plutôt qu’un paiement effectif en monnaie nationale : l’entreprise vendeuse reçoit un crédit en WIR et la société acheteuse le montant du débit correspondant. Les opérations sont centralisées au siège social de la banque WIR à Bâle. La monnaie étant totalement scripturale, les membres n’ont pas besoin d’argent liquide. Cela permet d’économiser du cash, de réduire le besoin des entreprises en fonds de roulement et de resserrer les liens commerciaux dans un groupe d’entreprises.

Complémentarité entre le WIR et le franc suisse

Le WIR a recours à une unité de valeur associée à une monnaie officielle, le franc suisse, mais elle n’est échangeable qu’en s’acquittant d’une taxe ou pourcentage de sortie. Ceci contraint les membres à l’employer à l’intérieur du cercle de participants créant ainsi un circuit d’échange qui lui est propre. L’objectif est clairement d’établir un système qui promeuve la dépense des revenus dans le cercle d’entreprises afin d’éviter toutes fuites et de favoriser l’entraide et la coopération.

Les membres acquièrent des WIR

soit en déposant des avoirs en monnaie suisse que la banque converti en monnaie WIR (sachant que l’inverse n’est pas possible),

soit en vendant ou en achetant des biens et services auprès des autres PME membres du cercle,

soit en faisant un emprunt en WIR à des taux, par ailleurs, très avantageux.

La majeure partie des transactions sont bi-monétaires, c’est-à-dire à la fois en WIR et en franc suisse, et chaque PME détermine son propre taux d’acceptation de paiement en WIR en fonction de ce qu’elle peut à nouveau dépenser sans difficultés dans le cercle d’échange. Les transactions sont donc conclues en partie en monnaie nationale.

Le caractère fondant de la monnaie améliore sa circulation

De plus, les avoirs en WIR possédés par les membres ne rapportent pas d’intérêt. Jusqu’en 1948, les avoirs étaient non seulement non rémunérés mais les WIR étaient fondants, c’est-à-dire qu’une taxe périodique était appliquée si les WIR ne circulaient pas dans le cercle de coopération. On impose ainsi des frais de conservation à la monnaie afin que celle-ci circule plus rapidement et ne soit pas stockée par les membres. Ce fonctionnement est empreint de la théorie développée par Silvio Gesell sur la monnaie franche (ou fondante), dont les fondateurs du WIR, une quinzaine de dirigeants de PME, se sont inspirés.

Des PME aux particuliers

Actuellement, la Banque WIR compte plus de 67 000 PME participantes soit environ 1/5 des PME suisses. Les transactions en WIR atteignent 1,7 milliards de francs suisses soit environ 1,1 milliard d’euros et le système monétaire WIR représente 1% de la masse monétaire en circulation en francs suisses. Par ailleurs, 884,5 millions ont été octroyés sous forme de crédits en WIR. Depuis 1998, le système WIR suisse s’est transformé en banque coopérative, ajoutant à ses fonctions originelles, un système de crédit en WIR à des taux avantageux et propose des services bancaires classiques comme des placements.

De plus, il s’est aussi ouvert au public des particuliers et met maintenant à disposition de ces clients une carte à puce WIR permettant de réaliser les paiements en WIR et Francs suisses (CHF) : 8 325 entreprises l’acceptent comme mode de paiement en WIR et 6 727 en WIR et CHF, pour 49 879 d’utilisateurs.

Ce dispositif est le seul survivant de la vague de création de systèmes d’échange-marchandises des années 30. Néanmoins, il y a eu une recrudescence de ces systèmes dans les années 80-90 surtout aux États-Unis et dans les pays anglo-saxons (beaucoup moins en Europe) sous le nom de Barter Club.

Selon l’Internationale Reciprocal Trade Association, organisation qui encadre ces pratiques, il y aurait 600 systèmes Barter dans le monde, pour un montant total de transactions 2009/2010 inter-entreprises correspondant à 12 milliards d’équivalents dollars contre 8,25 milliards estimés en 2004, progression expliquée par la récession de l’économie mondiale durant cette période « .(13)

Pour plus d’informations : http://www.wir.ch/

 

2)Le Chiemgauer :

 

La vocation du Chiemgauer est principalement celle du développement de l’économie régionale, mais son action est plus large, et contribue à un changement de comportements et un autre type de développement.

Origine et objectifs

Le Chiemgauerest une monnaie complémentaire locale qui circule dans la région appelée Chiemgau, dans le sud-est de la Bavière (Allemagne).

Cette monnaie fut initialement émise par l’école Waldorf de Prien am Chiemsee. Le système est maintenant indépendant de l’école. Son initiateur, Christian Gelleri, professeur d’économie à l’école et aujourd’hui «manager» du système, l’a pensée d’emblée comme un moyen d’échange complémentaire local contribuant au développement de la région

Comment cela fonctionne ?

Les personnes qui souhaitent utiliser le Chiemgauer doivent acheter les bons auprès de la centrale d’émission, contre des euros. On obtient 1 Chiemgauer pour le prix de 1 euro.

- Les euros doivent pouvoir être facilement changés en Chiemgauer. Ainsi, il existe plusieurs bureaux de change (des commerçants du réseau, quelques banques, 40 bureaux au total). Il suffit pour cela d’avoir une carte bancaire : le compte bancaire est débité de 100 euros, qui sont versés sur le compte de la coopérative Chiemgauer, et l’on reçoit 100 Chiemgauer.

Par ailleurs, la personne peut désigner une association qui recevra 3% de la valeur achetée, versé par la centrale d’émission. C’est une motivation très importante pour les consommateurs, car cela leur permet de soutenir une association ou une cause locale.

Les consommateurs peuvent ensuite dépenser ces Chiemgauer dans des magasins locaux, chez les commerçants qui les acceptent, à parité avec l’euro.

Les commerçants qui reçoivent ces bons ont alors plusieurs possibilités :

- Soit ils les dépensent. Pour rendre la monnaie à leurs clients, mais aussi pour payer leurs fournisseurs et dépenses diverses, ou encore pour verser une partie de la rémunération des salariés.

- Si une entreprise a trop de Chiemgauer, elle peut les échanger contre des euros. Dans ce cas, elle doit payer des frais de change pour un montant équivalent à 5% de la somme échangée.

La centrale d’émission couvre ses frais avec la marge de 2% qui se dégage des 5% de frais de change diminués du bonus de 3% versé aux associations désignées par les acheteurs de Chiemgauers.

La circulation de la monnaie est garantie par un système de «fonte». Au début de chaque trimestre, pour que la monnaie reste valable, chaque bon doit recevoir un timbre dont le prix équivaut à 2% de a valeur du bon. Les revenus générés par les timbres assurent une rentrée d’argent supplémentaire collectée par la centrale d’émission et qui sert à financer différents projets de nature sociale.

- Dans la pratique, la fonte est prise en charge par les entreprises. Ce sont elles qui payent le timbre de 2% et ainsi remettent les billets en circulation. En effet, en règle générale, les personnes achètent le nombre de Chiemgauer correspondant à leurs besoins, et n’ont pas d’excès de billets en fin de trimestre. Pour le commerçant, ce cout de la fonte est considéré comme un coût marketing.

- De fait, le coût de la prise en charge de la fonte est finalement très faible. En effet, le calcul doit être fait sur le trimestre : le commerçant ne payera le timbre de fonte que sur les billets qu’il a en caisse en fin de troisième mois du trimestre. Il n’a pas de coût de fonte pour les Chiemgauer qu’il reçoit durant les premiers mois du trimestre, et qu’il réutilise durant le trimestre. Le coût de la fonte supportée par le commerçant doit donc être calculé par rapport au montant total des Chiemgauer reçus durant le trimestre (et non seulement par rapport aux billets qu’il a en caisse en fin de trimestre et pour lesquels il payera le cout du timbre). Le coût pris en charge par le commerçant est alors de 0,5 ou 0,2 % du total des Chiemgauer reçus durant le trimestre.

- Le système de fonte ne pousse pas vraiment à la (sur) consommation. En réalité, on constate plutôt un ciblage des achats chez les commerçants de la région. On consomme plus en Chiemgauer, et moins en euros. Les personnes achètent les Chiemgauers dont elles ont besoin. Cependant, il est vrai que les entreprises observent un petit effet d’augmentation de la consommation sur la findu trimestre.

Par ailleurs, les euros collectés par l’achat de Chiemgauer sont déposés dans une banque éthique, qui fait des prêts à des projets d’associations ou entreprises de la région (agriculture biologique, écoles alternatives, etc…).

L’achat de Chiemgauer créé alors un stock d’euros mobilisables sur des projets de ce type. Ainsi, le Chiemgauer a démarré une activité de microcrédit, avec des prêts sur ce type de projets.

Les avantages du système.

Les entreprises disposent ainsi d’un outil de «fidélisation» de la clientèle, qui achète prioritairement chez elles. Le système permet également de renforcer les coopérations entre entreprises de la région (qui auront tendance à privilégier les relations commerciales où l’échange peut se faire en Chiemgauer).

- Pour le commerçant, le cout de cet outil correspondent aux 5% de décote qu’il doit prendre en charge s’il décide d’échanger ses Chiemgauer contre des euros, ou la prise en charge de la fonte s’il décide de remettre en circulation les billets reçus.

- Mais, contrairement aux outils marketing classiques, où la dépense est effectuée en espérant un retour en augmentation du chiffre d’affaires, avec le Chiemgauer, l’entrepreneur réalise d’abord son chiffre d’affaires, en acceptant les Chiemgauer.

Les clients peuvent bénéficier de remises directes chez les commerçants (pour des achats en Chiemgauer) et soutiennent des associations au travers de la prime versée à ces associations lors de l’achat de Chiemgauers.

Les Associations bénéficient ainsi d’un mode de financement novateur. La monnaie locale rapproche associations et entreprises, et les membres des associations s’engagent dans le système.

Pour les collectivités locales, la monnaie complémentaire permet le développement de l’activité économique locale. Cela apporte des taxes supplémentaires, permet un effet démultiplicateur des dépenses publiques et la promotion de la coopération entre acteurs du territoire.

Où en est on ?(chiffres 2010)

Le Chiemgauerfait partie du projet REGIO, qui regroupe environ 30 monnaies locales opérationnelles.

Le réseau Chiemgauer compte aujourd’hui 3.050 membres (1% de la population de la région) : 602 entreprises, 217 associations, 2230 consommateurs.

Il s’est associé récemment à un système local voisin, le Sterntaler.

De fait, le Chiemgauer s’est développé avec le bio, et 50 % des Chiemgauers en circulation passent par les agriculteurs bio. Par ailleurs, il privilégie sans aucun doute les commerces et productions locales. (De fait, il est difficile pour un commerce dont les relations commerciales ne sont pas dans la région, de s’adapter à un système local. Il aura peu de possibilités d’utiliser les Chiemgauers reçus de ses clients dans la région, et la décote systématique de 5% rend le système moins intéressant).

1,5 millions d’euros ont été changés en Chiemgauer « papier » en 2010,

520.000 Chiemgauers sont en circulation, (dont 330.000 en e-Chiemgauer,

la monnaie électronique).

Plus de 480 000 € ont été prêtés en micro‐crédits depuis février 2010.

Les Chiemgauers ont circulé en 2010 sur le territoire 2,3 fois plus vite que les euros (11,23 fois contre 4,87 fois pour l’euro) (14).

 

Références :

 

http://www.Chiemgauer.info

Christian Gelleri, International Journal of Community Currency Research Vol 13 (2009) pp.61-75.

Bernard Lietaer, Margrit Kennedy, Les monnaies régionales, 2008, Ed. Charles Leopold Meyer.

 

NOTES :

 

(1) : inventaire issu du Cahiers d’Espérance  » Richesses et monnaies », disponible à l’adresse suivante : http://www.pouruneautreeconomie.fr/?q=node/738

Pour s’informer sur ces différentes expériences, consulter :

- La mesure / Romans sur Isère / Drôme http://monnaie-locale-romans.org/

- L’Abeille / Villeneuve sur Lot http://agirpourlevivant.org/

- La Luciole / Ardèche Méridionale http://monnaie-locale-complementaire.net/2011/02/luciole/

- L’occitan, à Pezenas http://deviseoccitan.org/

- Les SELs  http://selidaire.org/spip/sommaire.php3

L’ annuaire des SELs en France http://selidaire.org/spip/article.php3?id_article=903

Coordination SEL Ile de France http://intersel.apinc.org/

- SOL : http://www.sol-reseau.org/

Quelques territoires SOL

- Sol Nord Pas de Calais http://www.apes-npdc.org/spip.php?r…

- SOL Violette / Toulouse http://www.sol-violette.fr/

- Sol Alpin http://www.alpesolidaires.org/blogs/reseausol

- Sol Viry Chatillon : http://www.solicites.org/index.php?…

(2) : voir, entre autres, pour les preuves statistiques et techniques, Bernard Lietaer, The Future of Money : Creating new wealth, work, and a wiser world, Londres, Random House, 2001

(3): Bernard Lietaer et Margrit Kennedy, Monnaies régionales – De nouvelles voies vers une prospérité durable, Éditions Charles Léopold Mayer, Paris, 2008, p.34 )

(4) : voir l’article très pédagogique de la toute nouvelle revue Kaizen, « Créer une monnaie locale », Texte de Anne Sophie Novel, dessin de Le Cil Vert, Kaizen n°2, mai-juin 2012.

(5) :Margrit Kennedy Libérer l’argent de l’inflation et des taux d’intérêt, Éditions Vivez soleil

(6) : Bernard Lietaer, Au cœur de la monnaie – Systèmes monétaires, inconscient collectif, archétypes et tabous, Éditions Yves Michel, août 2011

(7) : Bernard Lietaer et Margrit Kennedy conseillent de lire, sur ce point : Labrot (J.), Henckes ( J.), Une histoire économique et populaire du Moyen Age : les jetons et méreaux, Paris, Errance, 1989

(8) : Bernard Lietaer et Margrit Kennedy, Monnaies régionales – De nouvelles voies vers une prospérité durable, Éditions Charles Léopold Mayer, Paris, 2008, p.55-56)

(9) : Lao Tseu ( Mitchell ( traducteur) Tao Te King number 42, cité dans Bernard Lietaer, Au cœur de la monnaie – Systèmes monétaires, inconscient collectif, archétypes et tabous, Éditions Yves Michel, août 2011, p. 462

(10) : Bernard Lietaer, Au cœur de la monnaie – Systèmes monétaires, inconscient collectif, archétypes et tabous, Éditions Yves Michel, août 2011, p. 461

(11) : Ibid, p.461

(12) : Ibid, p.441. Voir aussi Bernard Lietaer et Margrit Kennedy, Monnaies régionales – De nouvelles voies vers une prospérité durable, Éditions Charles Léopold Mayer, Paris, 2008

(13) Texte de Marie Fare, doctorante à l’université de Lyon 2, pour la Lettre du réseau

SOL Alpin : texte issu du Cahier d’espérance  » Richesses et monnaies » http://www.pouruneautreeconomie.fr/?q=node/738

(14) Texte écrit par Celina Whitaker dans le cadre du Séminaire « Monnaies Complémentaires » organisé en2009 par l’Association SOL et la Mairie de Nanterre : texte issu du Cahier d’espérance  » Richesses et monnaies » http://www.pouruneautreeconomie.fr/?q=node/738

 

Quelques exemples de monnaies complémentaires dans le monde :

 

Monnaies territoriales

�� Regiogeld and chiemgauer (Allemagne)

http://www.regiogeld.de/ et http://www.chiemgauer.info/

�� Banco Palmas (Fortaleza, Brésil)

http://www.bancopalmas.org.br/

http://www.banquepalmas.fr/

�� Brixton Pound (Brixton,Angleterre)

http://brixtonpound.org/

�� Berkshare (USA)

http://www.berkshares.org/

Echanges temps

�� CES (Afrique du Sud et monde)

http://www.ces.org.za/

�� Timebanking (USA)

http://www.timebanks.org/

�� Time banking (GB)

http://www.timebanking.org/

�� Carte des banques du temps en Espagne

http ://www.google.com/maps/ms ?ie=UT…

Monnaies mixtes

�� Talent (Autriche)

http://www.tauschkreis.net

http://www.talentiert.at/

�� Calgary dollar (Canada)

http://calgarydollars.ca/

http://www.youtube.com/watch?v=e6R4…

�� Ithaca Hour

http://www.ithacahours.org/

Monnaies à Vocation économique.

�� RES (Belgique / France)

http://www.res.be/fr/index.asp?pid=a02

�� C3 ( STRO / Uruguay)

http://www.stro.org.uy

http://www.stro-ca.org/

�� BNB (Bâle, Suisse) (monnaie régionale et transnationale / développement

d’une économie durable, sociale, écologique)

http://viavia.ch/netzbon/